Le champagne ? Pas 100% français !

Le champagne ? Pas 100% français !, Le champagne ? Pas 100% français !

Là, j’ai votre attention, non ? Car, qui dit champagne, dit chasse gardée ! Pas question de nommer « champagne », le vin effervescent qui n’a pas son origine dans les coteaux de l’appellation protégée de la…Champagne… Mais est-ce pour autant un vin mousseux concocté exclusivement grâce au savoir-faire des Français ? Parlez-en aux Anglais, aux Allemands, mais surtout pas à Moët et Chandon qui continue de nous faire croire que le moine Dom Perignon a inventé le champagne…Suivez le guide…

Par Frédéric Arnould (lefred@toutsurlevin.ca)

Car ces « révélations » se retrouvent dans le nouveau guide de Guénaël Revel, celui qu’on appelle affectueusement ici au Québec, « Monsieur Bulles ». « Champagnes, guide et révélations », c’est en quelque sorte une salve contre les idées reçues et trop longtemps véhiculées par les grandes maisons du pétillant qui ont su ériger en dogme le marketing sauvage de l’appellation prestigieuse. Car, avoir le pouvoir d’apposer le terme « champagne » sur la bouteille est une garantie non seulement de succès mondial mais surtout de profits faramineux.

guenael revelGuénaël Revel a tellement le mot champagne tatoué sur le cœur que cela fait plus de dix ans qu’il a informé le CIVC (Comité Interprofessionnel du vin de Champagne) du « mini-scandale » créé par la compagnie aérienne canadienne Sunwing qui utilise à tort l’appellation champagne sur ses vols alors qu’elle ne sert qu’un infâme mousseux sucré qui n’a rien d’un champagne d’ailleurs (soucieux de l’investigation, je l’ai goûté lors d’un voyage dans les Caraïbes). Le fait est anecdotique, me direz-vous, mais est pourtant représentatif de l’intérêt et du respect que porte Monsieur Bulles au pétillant champenois. »J’ai rien voulu déboulonner mais plutôt remettre des choses à leur place, dire des vérités parce que j’ai lu des articles de journalistes français qui disaient des bêtises à propos de ceux qui font du champagne, à propos de Dom Pérignon… »

dom-perignonDom Pérignon n’a pas inventé le champagne

L’une des pierres angulaires du livre, c’est qu’il veut remettre les pendules à l’heure. « Le champagne est une création collective…Le champagne tel qu’on le connaît a à peine 100 ans ! Le champagne était très sucré. Jusqu’à Pasteur, on pensait que le sucre était le seul vecteur de l’effervescence. »

Mais alors, Dom Pérignon était-il celui qui « buvait des étoiles », le prétendu inventeur du champagne ? « Je n’enlève pas la paternité du champagne à Dom Pérignon, je dis qu’il a été le premier par contre, selon les écrits qui sont apocryphes, à avoir fait du vin blanc qui n’était pas blanc d’ailleurs, mais bien gris, avec des raisins rouges de l’époque…Dom Pérignon, on en a fait un mythe parce que ça sert la Champagne, comme toutes les régions vont essayer d’avoir pas un modèle, mais un levier….Dom Pérignon n’a jamais fait de bulles et n’en a certainement jamais bu, c’est à dire des bulles qu’on veut véritablement créer. Il a dû voir des bulles comme tout le monde, mais comme tous les moines de l’époque…il les a considérées comme des imperfections. » Il n’en demeure pas moins qu’aujourd’hui, Dom Pérignon reste l’un des champagnes les plus vendus à travers le monde et dont certains millésimes se vendent à des prix records.

Messieurs les Anglais, tirez les premiers !

Le champagne est-il malgré tout  une oeuvre esquissée par les Français ? Pas si vite, selon Monsieur Bulles. Les premiers « germes » du champagne remontent à la fin du 17ème siècle et ce ne sont pas les Français qui ont couché sur papier la première « recette » du champagne mais bien les Anglais, six ans avant les habitants de l’Hexagone. « Ce sont les Anglais qui allument la mèche pour donner des idées aux Champenois, parce que ce sont les Anglais qui, les premiers ont demandé du champagne qui était très acidulé et lorsque les vins arrivaient trois, quatre, cinq mois plus tard, ils se sont aperçus que le champagne revivait, c’était en fait une deuxième fermentation (en bouteille) et ils se sont mis à aimer ça…Si les Anglais ne s’étaient pas intéressés à ce produit tel qu’il est, le champagne aurait fini par exister plus tardivement et peut-être autrement. » Ensuite, les Français se sont « réappropriés » le concept. « À partir de 1728, le champagne « redevient » français parce que Louis XV décrète l’embouteillage du vin en France en Champagne pour le vin de Champagne. Et il n’y a pas de hasard. puisque en 1729, c’est la création de la première maison de négoce de Champagne, Ruinart. »

Et l’Allemagne alors ?

Avec ces révélations, Guénaël Revel ne doit pas se faire beaucoup d’amis parmi les ténors des maisons de Champagne, mais qu’importe… »Dom Pérignon et les Anglais, c’est une chose, mais il y a aussi les Allemands…Il y a toujours eu un lien affectif, il suffit de regarder les noms (des grandes maisons de Champagne : Koch, Bollinger, Roederer, Mumm, Krug…), y’a eu beaucoup de mariages, de cousinages. » Bref, l’Allemagne a été la « cousine » qui a forcé le progrès en Champagne.

guidePorto et champagne, jumeaux séparés à la naissance

L’une des hypothèses fascinantes du livre demeure l’étrange « ressemblance » entre le porto et le champagne. Par exemple, les premiers vins tranquille de Champagne étaient mis dans des bouteilles vides de porto. Ensuite les deux types de vins sont des assemblages de différents cépages, de millésimes (pensez aux portos « vintage ») et de villages. De plus, tous deux sont millésimés dans les années exceptionnelles. Sans oublier le fait que les deux vins sont transformés par un additif, dans le cas du porto avec du brandy, dans celui du champagne, avec des levures. »

Sachez que ce livre est rempli de faits et d’anecdotes tous plus intéressants les uns que les autres. En prime, le côté guide vous offre des notes de dégustations sur les bouteilles des plus grandes maisons de Champagne, disponibles sur le marché. Un chouette cadeau à offrir ou à s’offrir. (Champagnes, guide et révélations, Chez Isabelle Quentin éditeur, 193 pages)  Pour en savoir plus sur le contenu de ce livre, écoutez-donc le podcast (la baladodiffusion) avec Guénaël Revel que voici.