Du Champagne de haute couture
Bruno Paillard est un peu un OVNI (objet vinicole non identifié) dans le paysage champenois. En 1981, alors qu’il n’a que 27 ans et aucune vigne, il vend sa Jaguar pour financer sa société à hauteur de 15 000 euros et se lancer dans l’aventure un peu folle de faire du Champagne dans un milieu tellement contingenté et si peuplé de grandes maisons.
Par Frédéric Arnould (lefred@toutsurlevin.ca)
Après avoir loué une cave et acheté le raisin d’autres producteurs, il fait bâtir une cave révolutionnaire et s’enracine profondément dans le terroir champenois. Et c’est 1994 qu’il achète finalement ses premières vignes sur 3 hectares. Aujourd’hui, avec ses 32 hectares de vignobles dont 12 en grands crus, la renommée de ses cuvées l’a propulsé parmi les meilleurs producteurs de la Champagne.
Depuis, Bruno Paillard a été élu à la tête de la commission appellation du CIVC, le sacro-saint Comité interprofessionnel du vin de Champagne qui regroupe viticulteurs, négociants manipulants, maisons de Champagne, syndicats professionnels et les caves coopératives.
Paillard et ses petits « plus »
Le vigneron a fait le pari de la viticulture durable, sans désherbant ni pesticide. Dans le vignoble on trouve des rosiers, des fleurs, de l’herbe, bref un petit coin de nature dans un vignoble champenois qui n’a pas toujours pris ce chemin écolo, faut-il le rappeler.
Et puis rares sont les producteurs qui indiquent sur leurs bouteilles la date de dégorgement de leur champagne. Cette opération consiste à se débarrasser du dépôt que le remuage de la bouteille en cave a fait s’accumuler dans le goulot de la bouteille. La plupart du temps, le col de la bouteille est alors plongé dans un liquide à moins 25 degrés Celsius ce qui fait que ces indésirables dépôts sont gelés. Il suffit ensuite de décapsuler la bouteille pour expulser le « glaçon » emprisonnant les levures et le dépôt (dégorgement). Puisque une partie du liquide a donc été retirée, le vigneron remplacera alors ce « manque » par un peu de vin et de sucre, c’est ce qu’on appelle la « liqueur de dosage ». C’est ce mélange qui déterminera si le vin mousseux est sec (brut, extra-brut), demi-sec, ou moelleux (plus sucré). Enfin, on referme la bouteille avec un bouchon de liège (en forme de champignon), surmonté d’une capsule et du muselet. Le tout sera alors équipé de l’étiquette et de la collerette. Une bouteille coquette, quoi !
Ainsi, Bruno Paillard a été le premier à mentionner sur ses bouteilles la date du dégorgement de ses bouteilles. Cette seconde naissance ainsi imprimée sur la flacon, le champagne peut alors retourner en cave pour l’essentiel vieillissement. La mention de cette date de dégorgement est une marque de respect pour le client, aime répéter Paillard.
Récemment dégustés…
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Bruno Paillard, Brut, Première Cuvée, Champagne
Avec sa dominante de pinot noir (45%), ses 33% de chardonnay et 22% de pinot meunier, ce champagne élaboré à base de 32 crus différents vinifiés séparément ne comporte que 6 grammes de sucre résiduel. Les parfums d’agrumes s’intercalent avec ceux des petits fruits rouges de jolie façon. Ajoutez l’élégante minéralité, pur produit du sol crayeux, et vous obtenez un superbe champagne raffiné où les arômes de pain grillé prennent leur place mais pas trop. Du très beau jus ! En SAQ Sélection. (69$)
Bruno Paillard, Brut, Première cuvée, Rosé, Champagne
Un champagne qui fait dans la belle vinosité gourmande. À la fois floral, cet effervescent regorge de petits fruits des bois et de griottes. La bulle est joliment fine et propulse l’élégance fruitée vers le palais, tout en vivacité. Aérien et volubile. Quantité limitée. (86,25$)
Enfin, si le cœur vous en dit, il y a au Québec quelques bouteilles (36 seulement !) de sa cuvée Zéro dosage, qui est un véritable bijou de finesse ciselé à la perfection et à la finale saline. Du grand art. Disponible en importation privée seulement chez http://www.selectionsfrechette.com/