Faut-il toujours servir le vin blanc avant le vin rouge ?
On nous rebat souvent les oreilles avec cette maxime : « Blanc puis rouge, rien ne bouge, rouge puis blanc, tout fout le camp. » Ce dicton semble s’être inspiré d’une expression qui origine de la marine : « Si le pavillon blanc est au-dessus, les marins restent à bord, rien ne bouge. Mais si le rouge est au-dessus, c’est quartier libre et là, tout fout le camp. » Bref, il faudrait donc toujours boire le vin blanc avant le vin rouge. Or, qu’en est-il en réalité ?
Par Frédéric Arnould (lefred@toutsurlevin.ca)
On choisit souvent l’ordre des vins en fonction de ce qu’on mange. Traditionnellement, dans les bons repas, on commençait par une assiette de poisson pour ensuite enchaîner avec un plat à base de viandes. Par conséquent, on servait pour débuter un vin blanc et on terminait par un rouge corsé genre cabernet sauvignon pour accompagner le steak. Après, on pouvait toujours poursuivre avec une assiette de fromages et/ou un dessert. Dans le premier cas, on débouchait souvent un rouge de très bonne qualité sans égard au type de fromages que l’on mangeait (grave erreur) et ensuite on terminait par un café.
Alors, que faire de ce dicton ?
Permettez-moi de vous servir…une réponse de Normand ! Ce n’est pas complètement faux mais c’est très loin d’être systématiquement vrai ! Voyons dès lors quelques règles de base.
Règle numéro 1 : progressons vers la puissance et la qualité
Avant tout, c’est la densité et la matière du vin qu’il faut prendre en considération. Servez un vin blanc léger sec ou un rosé et à peu près n’importe quel vin rouge pourra suivre sans problème. Mais si vous servez un blanc puissant, il faudra que le rouge soit d’égale consistance. Sinon, si vous servez un rouge léger et fruité (un gamay du Beaujolais ou de la vallée de la Loire par exemple), ensuite versez le blanc corsé. Bref, le fin et le délicat, toujours avant le puissant et les grands vins de qualité !
Règle numéro 2 : le jeune avant le « vieux »
Un bon vin qui a bien vieilli sera plus complexe, avec des arômes secondaires et parfois tertiaires qui se seront développés en bouteille avec le temps. Cette qualité doit s’apprécier et mérite qu’on s’y attarde. Si vous décidez de boire le vin jeune fougueux après ce bon vin, vous risquez de trouver le petit jeune plutôt décevant, court, trop fruité et bien souvent plus lourd en alcool, bref un gâchis.
Règle numéro 3 : le sec avant le « sucré »
Il est de coutume de commencer des libations avec un vin mousseux sec (brut et extra brut) et c’est une très bonne idée car sa « pétillance » réveillera nos papilles et les préparera pour la suite des choses. Par contre, il arrive d’embrayer les festivités avec un vin plus sucré voire « liquoreux » comme un porto (souvent en Europe) ou un blanc de type « sauternes ». Ce n’est pas l’idéal car, votre bouche sera déjà tapissée de sucre et les blancs ou rouges qui vont suivre seront forcément plus secs et cela risque d’être désagréable. Je sais, difficile de résister à des escalopes de foie gras poilé sans boire un Sauternes… Dans ce cas, « rincez-vous » la bouche avec un verre d’eau ou prenez un peu de soupe (si c’est au menu) avant de poursuivre avec un autre vin blanc ou rouge de très grande qualité qui sera capable de mesurer avec votre vin doux. Bref, presque toujours, les vins secs avant les vins « moelleux ».
Une règle non écrite
En fait, l’acidité (ce qui nous fait saliver) et la fraîcheur en bouche d’un vin blanc permet souvent de fouetter notre palais parfois saturé par la matière plus imposante d’un rouge. Normal puisque le plus haut taux d’alcool du rouge et surtout ses tanins (qui donnent cette sensation d’assèchement en bouche) nous surchargent parfois les papilles. C’est d’ailleurs pour cela que personnellement, j’aime bien finir un repas avec un verre de vin mousseux, juste avant le dessert. Cela « nettoie » et ravive mes papilles. Mais si vous insistez vraiment pour boire du vin avec votre dessert, assurez-vous que le vin soit aussi, sinon davantage, sucré que votre dessert.
Au final, tout ceci, c’est aussi plus une question de quantité dans le fond. Si vous buvez à 4 personnes, quatre bouteilles de vin en moins de deux heures, il y a fort à parier que certains d’entre vous seront un peu « groggy » voire vaseux. Tout est dans la modération. Dernière règle non écrite ? Essayez et tentez des accompagnements de vins en fonction de vos plats, et surprenez vos amis. À la bonne vôtre !