Pascal Marchand, le rebelle québécois de la Bourgogne
Certains en rêvent toute leur vie, tandis que d’autres passent à l’action. C’est le cas de Pascal Marchand, un Québécois d’origine qui s’est laissé guider par sa passion pour le vin dans une région, la Bourgogne, où faire du vin en biodynamie peut passer pour de la folie.
Par Patricia Chagnon (pchagnon@hotmail.com)
Après des études en littérature à Montréal, Pascal Marchand, l’aspirant poète, débarque en Bourgogne dans les années 1980 pour se familiariser avec le métier de viticulteur. En 1985, dans sa jeune vingtaine, il est engagé comme vigneron par le Comte Armand du prestigieux Clos des Épenaux dans l’appellation Pommard. Après avoir réussi à remettre sur pied le domaine, il décide alors en 2006 de fonder sa propre maison éponyme. Quatre ans plus tard, il s’associe avec Moray Tawse pour créer la Maison Marchand-Tawse et réussit son pari de s’imposer en sol français dans une région qui demande une expertise reconnue.
C’est justement ce qui a attiré le réalisateur David Eng dans son documentaire Grand cru, tourné en 2016. Il voulait retracer le parcours de cet autodidacte, mais Dame Nature en a décidé autrement puisque le gel, la grêle et de fortes pluies attendaient l’équipe en Bourgogne, ce qui a complètement changé l’angle de leur projet.
Les défis de la Nature
Au début, Pascal Marchand était très enthousiaste mais quand les caméras ont débarqué et que Dame Nature a envoyé son premier défi de 2016, le gel, il avait envie de se cacher et ne voulait pas parler. La frustration le tenait à la gorge : « C’était difficile de parler de gel parce que je voyais les autres problèmes arriver comme le mildiou (un champignon dévastateur pour la vigne). Quand je voyais la caméra, j’avais du mal à le vivre, je me sentais vraiment touché par un grand malheur, j’avais du mal à accepter ça. On ne peut jamais prévoir ce que la météo nous réserve.» Malgré ceci, il s’entête à imposer la biodynamie au vignoble et ainsi un stress assuré à toute son équipe. C’est-à-dire, que même si ses vignes présentent des traces de mildiou, Marchand n’utilisera pas de pesticides et continuera à faire confiance aux étoiles dans toutes les étapes de la production du vin. Rebelle un jour, rebelle toujours!
Biodynamie en Bourgogne
Marchand utilise en effet les mêmes préceptes que le Domaine de la Romanée-Conti entre autres, qui tend à éliminer les intrants chimiques et à ajouter dans le vignoble des préparations à base de fumier de bovin dans des cornes ainsi que d’autres élaborées à partir de camomille, d’ortie, d’écorce de chêne ou encore de valériane. Bien sûr, Marchand a aussi réintroduit le cheval de labour pour ne pas compacter le sol comme dans les vignobles dits conventionnels. Bref, laissez faire la nature avec toutes les conséquences positives et négatives que cela implique. Dans le climat pas toujours facile de la Bourgogne, le moins que l’on puisse dire, c’est que Marchand y a goûté en 2016.
Le réalisateur, David Eng voulait faire un film qu’autant les experts du vin que les novices en la matière apprécieraient afin de rejoindre tous ceux et celles qui s’intéressent de près ou de loin au domaine vinicole. Pari réussi ! Sous la trame d’une météo qui a été une des pires dans le millésime 2016, nous découvrons toute une équipe qui travaille d’arrache-pied pour produire ce petit plaisir de la vie dans un film qui démontre toutes les difficultés du choix de faire du vin en «biodynamie artisanale».
Le bon choix
Malgré cette expérience de l’année 2016, Pascal Marchand ne se voit pas vivre une autre vie et il la choisirait, encore une fois, en Bourgogne pour son histoire et les vignes : «Je ne m’imagine pas ailleurs que là.» Il sait qu’il y aura d’autres belles années : « 2016 a été frustrante quant à la quantité, mais le vin en ressortira plus grand, plus classique.»
A-t-il un conseil pour les rêveurs qui voudraient traverser l’Atlantique pour vivre leur passion du vin? Il répond qu’il faut essayer de voir quel genre de vin vous voulez faire et si le type de sol pourra compléter le produit. Parce que le sol a une influence sur le produit final.
Et pour ceux qui se demandent, la poésie n’a jamais vraiment quitté la vie de Pascal Marchand. D’ailleurs, il a le projet, 40 ans plus tard, d’écrire sur la vie, mais ça, c’est une autre histoire.
Grand cru sera présenté dès le 6 avril au cinéma Beaubien à Montréal et au cinéma Le Clap, à Québec.
Quelques rares cuvées en vente à la SAQ ici.
Je suis un des 4 amis de Pascal qui a fait les vendenges en 1983 et j’étais a la première du visionnement quel beau film documentaire qui parle des haut et des bas d’un travail très exigean.