Un vigneron créateur de bonheur
Les pesticides et autres intrants chimiques sont devenus la norme pour beaucoup trop de vignobles. Il suffit de regarder ce reportage fascinant de Cash Investigation pour se rendre compte que le ver est dans le fruit depuis longtemps. Et Bordeaux évidemment n’échappe pas à cette règle. Pourtant, il existe quelques domaines bordelais qui n’ont jamais succombé à la tentation. En voici un qui est resté proche de la Nature depuis des décennies.
Grâce à sa capsule de cire rouge pour en préserver le bouchon, ce vin est reconnaissable entre tous sur les tablettes de bordeaux vendus par le monopole. Ce vin élaboré sur le même plateau calcaire que les vins de Saint-Émilion a conquis le Québec depuis des lunes. C’est en 1610 que la famille Amoreau a adopté, comme principale ressource, la culture de la vigne. Et c’est en 1964 que leur domaine bordelais est devenu le premier à produire du vin biologique.
Du Bordeaux fièrement bio
Pas d’engrais chimiques, ni herbicide, ni insecticide de synthèse. Encore moins d’ajout de de levure, de chaptalisation ou encore de soufre. Et depuis 1990, le vignoble a même basculé en biodynamie. Le plus incroyable dans tout ça, c’est que c’est au Québec que l’on trouve leur bordeaux au meilleur prix dans le monde entier. Car oui, le prix est au Québec même inférieur à ce que les Bordelais paient chez eux pour la cuvée Émilien du Château Le Puy. Anomalie ? Bien sûr, mais on ne s’en plaindra pas ! 28 $ ici, 24 euros ailleurs dans le monde…
Vive les lombrics !
Jean Pierre Amoreau est en tout cas tout un personnage. Avec ses longs silences, ses pauses, on l’écoute, captivé par cet homme qui parle de molécules, d’énergie, de magma, de cosmos et de lombrics. Oui, de lombrics qui pullulent sur ses terres. « Il y a 350 mille bactéries au mètre carré dans le sol de nos vignobles, qui se mangent les unes les autres, et qui se parasitent entre elles. Le lombric, dernier de la chaîne alimentaire procure les oligo-éléments avec ses propres excréments, à la terre… » Et des lombrics, il y en 2 tonnes à l’hectare, selon ses calculs.
Tout un programme, non ? Amoreau veut vraiment rendre au vin une possibilité de symbiose entre les amateurs que nous sommes et la Nature. Pas étonnant donc qu’il n’ait pas attendu que le bio et la biodynamie deviennent à la mode. Non, Amoreau, c’est un humaniste digne de ses ancêtres qui ont pris le chemin du respect de la Nature et le perpétue. Bref, on boit ses paroles comme un nectar.
Surtout quand il clame que la molécule du vin est comme un capteur. Avec son Château Le Puy, il dit produire des molécules de confort, qui donnent une impression de bonheur. Alors buvons un peu de bonheur….
Château Le Puy, Cuvée Émilien, 2014, Bordeaux, France
La cuvée Émilien fait partie des grands classiques toujours vendus à la SAQ. Même l’étiquette n’a jamais vraiment changé. À ce prix dérisoire pour la qualité, vous aurez droit à un vin épicé avec des notes florales délicates, des tanins très fins, un fruité généreux (rouge) tout en équilibre avec l’acidité. Sans oublier ses notes un peu sauvages qui vous titillent les papilles. Un beau vin qui vieillit toujours bien en cave. Faites en provision. (28,45$)
Château Le Puy, Cuvée Barthlemy, 2010, Bordeaux, France
Le domaine a réussi à placer cette cuvée remarquable dans 20 succursales du monopole. Quelques caisses seulement pour tâter le marché et convaincre qu’il n’est pas nécessaire de dépenser des centaines de dollars pour les grands crus classés. Évidemment, on est une coche très sérieusement au-dessus avec un vin qui est l’expression d’une seule parcelle (seulement 15 000 bouteilles produites). Avec ses 24 mois de barriques, cette cuvée est très réussie dans ce millésime 2010. Belle évolution déjà, avec ses arômes de cuir de tannerie, ses tanins tellement soyeux et cette belle finale en bouche qui nous offre toute une plénitude. Vaut pleinement certains grands crus classé, mais avec un prix plus abordable. (170,25$)