Moi, Marc Chapleau, simple « connaisseur »…

Une carte Inspire de la SAQ

Je l’ai pris personnel. Il s’agit d’un calque, je le sais, et je devrais plutôt écrire que je me suis senti visé. Mais l’affront n’en demeure pas moins : selon le Profil d’achat qui s’affiche sur mon compte SAQ Inspire, je ne serais qu’un « Connaisseur ».

par Marc Chapleau

Ce type de consommateur, selon la terminologie saquienne, aime approfondir avec son conseiller ses connaissances sur les vins et les spiritueux, et il « cherche des petits bijoux dans l’Espace Cellier ». Pas vraiment de quoi être gêné, c’est vrai. Sauf qu’au-dessus de moi, une coche plus haut, c’est « Passionné ». J’aurais pourtant cru, sans fausse modestie, me situer quelque part pas très loin du dessus du panier…

Si le camouflet sur le coup m’a perturbé, je n’ai pas été long à rationaliser.

Le monopole se base sur mon historique d’achat pour m’accoler une pastille ; or, ces derniers temps, mes dépenses en la matière ont passablement diminué. La faute au grand âge et à la grande espérance de vie de certaines bouteilles, notamment. Il y a aussi que je consomme moins, des jours sans je connais ça maintenant – même si après deux jours d’abstinence j‘ai tendance à grafigner les murs, au grand déplaisir de ma dure moitié.

Moralité ? Inspire, expire, inspire, expire. Relaxe, quoi.

Vin, Moi, Marc Chapleau, simple « connaisseur »…Une saynète à l’aveugle

L’ami en question, un bon amateur de vin, me tend un verre de blanc à l’aveugle. « J’aimerais que tu me dises ce que t’en penses », lâche-t-il avec un air espiègle.

Je zyeute le contenu puis je renifle, comme il se doit. J’ai bien une fugace pensée pour le contenu de son cellier, mais comme le bougre aime et stocke à peu près n’importe quoi, de l’Australie à l’Argentine en passant par Bordeaux et la Bourgogne, autant pour ma peine, bien difficile d’essayer de deviner ce qu’il a pu exhumer.

Goûtons, voir.

C’est pas mal du tout, léger, équilibré, un poil parfumé et plutôt délicat, bien que la composante boisée est mal intégrée, on goûte le fruit d’un côté, le chêne de l’autre.

« Vin québécois ? », me risquai-je. Le Chardonnay 2018 La Cantina Vallée d’Oka, c’était. En toute justice, beaucoup mieux que le 2017 du même vin que nous avons testé ce printemps, à Protégez-Vous, et qui avait alors hélas mal paru.

Peut-être le propriétaire me verra-t-il un peu plus dans sa soupe, à présent ?

P.-S. L’expression « voir quelqu’un dans sa soupe » est-elle un calque de l’anglais, elle aussi ? J’ai cherché, notamment sur Termium, sans trouver.

À boire, aubergiste !

Quatre vins de la semaine selon Marc Chapleau

Cliquez sur le prix pour les disponibilités près de chez vous.

Beaujolais, Jean Foillard, Collection Rézin, 2017, France

Pur gamay, pure fraîcheur, pur plaisir, comme chaque année ou presque. Pas donné, mais la qualité y est, on l’aura compris, et en plus ce n’est dénué ni de profondeur ni de minéralité. Vive le bojo ! (25,55 $ / ****)

Priorat, Mas Igneus, Rost, 2016, Espagne

Un peu de réduction au premier nez, le fruit est cependant là tout près, derrière. Bouche mi-corsée, fraîcheur, légère et plaisante astringence minérale ; une sorte de croisement, si la chose se peut, non, je n’ai rien fumé, un X disais-je entre un beaujolais granitique et un châteauneuf-du-pape. Quoi qu’il en soit, très bon rapport qualité-prix que ce rouge espagnol élaboré non loin de Barcelone. (20,45 $ / *** 1/2)

Chablis Nicolas, Potel, 2017, Bourgogne, France

Excellent chablis de la maison Nicolas Potel, à Nuits-Saint-Georges, vif et minéral, bien typé avec son délicat arôme de pierre à fusil, et à la finale agréablement relevée, un poil acidulée et toute en fraîcheur. (27,35 $ / ****)

Amontillado, Los Arcos Lustau, Espagne

Délicieux ! Une sorte de croisement entre un vieux madère sercial (D’Oliveira !) et un fino, si encore une fois la chose est possible ou même seulement imaginable. Bien sec, noisetté et acidulé, profondeur et générosité. À petites gorgées… souvent ! (18,60 $ / ****)